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L’ami spirituel [1]  

Ce texte fait suite au Culte de l'Avatar et au Culte du Rien

 

Abandonner un extrême ne nous obligeant pas à nous précipiter à l’autre extrême, il est sans doute nécessaire de souligner la possibilité d’avoir une relation respectueuse et attentive avec une personne avisée que l’on considère comme un ami spirituel, un conseiller voire un soutien.

Ce que je dénonçais dans les textes précédents est la prolongation de la quête affective - et donc de la dépendance à l’autre - dans une démarche entreprise à l’origine pour trouver l’indépendance. Mais il reste que les étudiants ont besoin d’un professeur pour leur enseigner des réalités qu’ils ne connaissent pas afin de pouvoir grandir et s’établir ensuite dans une  existence autonome. Cependant, la relation du professeur à l’étudiant n’est pas une relation de dépendance. L’étudiant qui a compris la nature de sa relation avec le professeur ne charge pas ce dernier dans son imaginaire de pouvoirs particuliers au-delà de sa capacité à l’informer et à le guider sur des questions pour lesquelles il est compétent.

La démarche spirituelle authentique repose sur les mêmes principes. Il n’est pas question de nier la valeur d’une « relation d’aide », et plus généralement des prises de conscience qui naissent de toutes relations ouvertes mais de mettre en évidence les mirages de la quête fondée sur une demande d’amour souvent inconsciente et en tous cas déplacée.
Les idoles que l’on a adorées sont un jour jetées aux pieds de leurs socles quand elles se révèlent incapables de nous fournir ce qu’on leur demandait. Après les avoir entourées de guirlandes de fleurs, on en vient à leur cracher dessus (voir le chapitre 9 « Qu’est-ce qu’aimer ? »). Le culte de l’illusion conduit à de telles réactions, un mouvement de balancier d’un extrême à l’autre, de l’adoration au meurtre rituel, une violence traduisant la confusion qui règne sur nos propres motivations, sur les moteurs véritables de nos paroles et actions.
Nous sommes les seuls responsables de ce que nous avons investi « en l’autre », responsables de nos illusions (même si certaines personnes malhonnêtes peuvent en jouer, nous devons prendre notre responsabilité et réaliser que nous, en tant que "chercheurs", avons créé un «marché» pour cela) et donc de nos déceptions.

 

Thierry Vissac (extrait du livre "Pièges et Illusions de la démarche spirituelle")

 

Lire également « Aide-moi à faire seul ! » et Maîtres et disciples

 


[1] « Il est utile d'être en contact avec des gens à travers lesquels la lumière de la réalité brille un peu plus clairement qu'à travers nous. Dans la tradition bouddhiste, ces gens sont connus sous le nom d'amis spirituels, Kalyana Mitras » L’idéal du Bodhisattva par Sangharakshita.

Le Bouddha demande :

« Dites moi ce que vous pensez de ces feuilles, dans ma main, sont-elles nombreuses ou non, comparées à celles de la forêt ? »

Les disciples répondirent :

«

En comparaison avec toutes les feuilles de la forêt, celles dans ta main ne sont rien. Il ne s'agit que d'une poignée. »

Alors le Bouddha leur dit :

« Il en est ainsi des vérités que j'ai été capable de vous révéler comparées à celles dont j’ai pris conscience. »

© Thierry Vissac, Textes, photos et dessins sur toutes les pages du site .