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Le dialogue en vérité

Un échange authentique

Thierry Vissac

 

 

Le mensonge tient une grande place dans les rapports humains. Il est parfois perçu comme un phénomène naturel, un outil de protection, une stratégie plus ou moins consciente pour obtenir la reconnaissance. Mais plutôt que de se sentir protégé et aimé, nous souffrons en fait de cette division avec soi et avec les autres.

Nous avons besoin de restaurer un dialogue en vérité. Parler vrai et entendre vraiment. Le dialogue en vérité ne peut venir que du désir profond de communiquer ce que l’on est et ce que l’on vit et du désir d’entendre ce qui peut nous faire grandir.

Nous avons une telle habitude de travestir nos ressentis, de se présenter masqué devant les autres, et de les empêcher de nous dire ce qu’ils pensent de nous, que le bienfait évident d’un dialogue en vérité doit encore être expliqué et que sa mise en place pour des relations saines est parfois laborieuse.

Il existe plusieurs barrages. D’abord, nous voulons éviter le conflit par peur d’y trouver le rejet, d’y perdre l’amour ou d'être incompris. Nous savons comment créer une harmonie superficielle et nous faisons souvent le choix d’en rester là. Cette habitude doit être mise en lumière pour éviter de la laisser conduire nos discussions. Ensuite, nous sommes parfois étrangers à nous-mêmes, car ce que nous ressentons ne nous est pas toujours très clair. Si bien que, dans le flot d’une relation à l’autre, un malaise, une tension, une émotion mais aussi une intuition et un sentiment peuvent être étouffés et tus, au profit de quelques paroles de surface, sans substance. Cette coupure doit être guérie avant de discerner ce que nous pouvons communiquer pour le bénéfice du dialogue. Enfin, nous sommes souvent confus quant à nos propres motivations. On m’a souvent présenté l’argument « ne pas blesser l’autre » pour justifier le mensonge. Or, maintenant que nous sommes conscients du fait que nous cherchons surtout à ne pas être « blessé en retour » (perdre l’amour, comme je disais plus haut), nous ne pouvons plus nous raconter d’histoire. C’est avant tout un instinct personnel et non un altruisme qui nous conduit à « ne pas dire et  ne pas recevoir ».

Le dialogue en vérité est une nécessité, une évidence spirituelle. Qu’il faille en expliquer prudemment la valeur, sans parler de la suggérer dans le feu de nos dialogues, nous montre à quel point nos rapports sociaux sont pervertis. Lorsque je parle à des personnes qui veulent travailler ensemble à de grands idéaux, je leur propose toujours de fonder leurs efforts sur le dialogue en vérité. Mais la peur est viscérale, il faut le reconnaître. Des décennies de formatage ne se dissolvent pas en un instant. Je crois malgré tout que si nous nous souvenons que nous aspirons à l’amour et la communion, que notre âme souffre d’être remplacée par un personnage étranger qui a pris trop de place à la surface de notre vie et que nos projets communs ne s’accomplissent que s’ils sont sous protection de la vérité, nous tenterons plus facilement de traverser cette peur.

Nous pouvons le visualiser ainsi : je suis en présence de l’autre pour lui dire qui je suis et ce que je ressens et entendre à mon tour ce qu’il est et ce qu’il ressent. Il n’y a pas de menace dans une telle interaction. Nous pouvons retrouver en nous-mêmes, avant toute discussion, et avec les autres, avant toute réunion de travail, l’image fluide et lumineuse de ce dialogue en vérité afin qu’il nourrisse nos âmes et nos projets. Je garantis que nous ne quitterons plus un groupe d’amis ou de collaborateurs avec cette frustration qui suit souvent les discussions sans vérité.


 

 

  © Thierry Vissac, Textes, photos et dessins sur toutes les pages du site .